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RPS & crise sanitaire : comment adapter sa démarche pour la rendre plus efficace ?

À l’ère de la pandémie, la virtualisation du travail s’est grandement accélérée, devenant pour beaucoup de salariés la norme et non plus l’exception. Ce rapide changement dans l’organisation du travail ne se fait pas sans heurt : au caractère anxiogène de la crise sanitaire et à l’isolement que cette dernière induit, peut s’ajouter le sentiment d’être dépassé et de ne pas trouver sa place dans les nouvelles modalités du travail. Tout cela concourt à la création d’un terreau fertile sur lequel les risques psychosociaux menacent d’émerger ou émergent déjà avec une ampleur inédite. Pour faire face, il est nécessaire d’adapter sa démarche de prévention des RPS à la conjoncture exceptionnelle que nous vivons.
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Sommaire
Quelques rappels sur les RPS
L’obligation de prévention des employeurs
Prévenir les RPS : une démarche éminemment rentable !
Les chiffres du coût des RPS
RPS et Covid-19 : une hausse alarmante
Comment prévenir efficacement les RPS ?
1) Quelques rappels sur les RPS
En 2011, un collège d’expertise sur le suivi des RPS définit ces derniers comme « des risques pour la santé mentale, physique et sociale, engendrés par les conditions d’emploi et les facteurs organisationnels et relationnels susceptibles d’interagir avec le fonctionnement mental. »
Dit autrement, il s’agit de l’ensemble des éléments susceptibles de porter atteinte à l’intégrité physique et à la santé mentale des salariés au sein de leur environnement professionnel.
Ce même collège propose une classification de ces risques en six catégories :
L’intensité et les temps de travail ex : objectifs trop élevés, déséquilibre entre vie professionnelle et vie personnelle
Les exigences émotionnelles ex : impossibilité d’exprimer ses émotions, travailler avec « la peur au ventre »
Le manque d’autonomie ex : tâches répétitives et monotones, surabondance de procédures à respecter, manque de formation et de compétences
Les rapports sociaux au travail dégradés ex : agressivité, harcèlement, discrimination, faible reconnaissance, faible soutien
Les conflits de valeurs ex : manque de sens, sentiment d’inutilité, conflit éthique
L’insécurité de la situation de travail ex : menace pesant sur son poste, nombreux changements organisationnels, stratégiques ou technologiques
Les conséquences des RPS sont variées et peuvent être extrêmement graves : problèmes de sommeil, dépression, troubles musculosquelettiques (TMS), maladies psychosomatiques, etc.
2) L’obligation de prévention des employeurs
Pour éviter les RPS et leurs conséquences, les employeurs sont légalement tenus de « prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs » (article L.4121-1 du Code du travail).
Cette obligation est matérialisée par le DUER : le Document Unique d’Évaluation des Risques, qui dresse dans chaque entreprise un inventaire des risques identifiés et propose des actions pour les prévenir en conséquence.
Ces problématiques se retrouvent également dans les négociations annuelles sur la Qualité de Vie au Travail, légalement obligatoires depuis la loi Rebsamen de 2015.
Enfin, récemment (décembre 2020), un nouvel Accord National Interprofessionnel (ANI) a été signé. Ce dernier porte plus spécifiquement sur la santé au travail et s’articule autour de trois axes majeurs :
Une prévention renforcée des risques professionnels en entreprise
La lutte contre la désinsertion professionnelle
La promotion de la qualité de vie au travail, en lien avec la santé
Cet ANI apporte deux nouvelles actions clefs :
Le « passeport de prévention », qui liste les formations suivies et les certifications obtenues en matière de sécurité et de prévention des risques professionnels
Le renforcement du rôle du DUER qui se voit adjoindre un « programme annuel de prévention » obligatoire, accompagné d’un calendrier de mise en œuvre.
3) Prévenir les RPS : une démarche éminemment rentable !
Outre l’obligation légale, en matière de prévention des RPS, on pense souvent à l’intérêt des salariés. On pense en revanche bien moins souvent à l’intérêt des employeurs ! Les RPS sont en effet un véritable gouffre financier pour les entreprises et plus largement pour la société. Les éviter, c’est donc améliorer le bien-être général et réaliser de conséquentes économies !
4) Les chiffres du coût des RPS

5) RPS et Covid-19 : une hausse alarmante
Tout impressionnants qu’ils soient, les chiffres précédemment cités datent de 2013, soit bien avant l’ère de la Covid-19 et du confinement. Si l’on suppose une certaine linéarité entre les RPS et leur coût pour l’économie, il est probable que les coûts actuels des RPS soient bien plus élevés.
Les transformations brutales que la pandémie a apporté au monde du travail ont en effet eu pour conséquence une hausse significative des RPS et de leurs conséquences

6) Comment prévenir efficacement les RPS ?
Dans cette situation de crise inédite, adapter sa démarche de prévention des RPS est essentiel pour protéger ses salariés et ainsi armer son entreprise pour faire face aux défis de la conjoncture actuelle. Seulement, face au caractère anxiogène de la situation et à l’ampleur de la tâche, on peut vite se retrouver démuni et ne pas savoir comment procéder. Pour pallier ce problème, nous vous proposons une méthodologie en quatre étapes.
Étape n°1 : créer une équipe pour mener le projet RPS
Pour entreprendre ou pour ajuster une démarche de prévention des RPS, il convient en premier lieu de former une équipe à qui confier cette tâche.
Quels acteurs impliquer ?
Pour être efficace et espérer toucher l’ensemble des acteurs de l’entreprise, l’équipe doit être représentative des ces différents acteurs. Elle doit donc être multidisciplinaire et impliquer tous les niveaux de l’entreprise. Pour ce faire, on réunira :
Des RH et, s’il existe, le responsable QVT, pour piloter le projet
Des salariés volontaires
Des managers
Des représentants du personnel
L’employeur ou bien des représentants de la direction
Le service de santé au travail
Pour les petites structures, il peut également être tout à fait pertinent de faire appel à des intervenants externes tels que des infirmières, des psychologues du travail, des ergonomes, des experts RPS, etc.
L’importance d’impliquer le management
Les managers sont un levier pivot pour la prévention des RPS, particulièrement à distance, car ce sont eux qui sont au contact des équipes. Il est donc essentiel de les impliquer. Si elle concerne certes tous les acteurs de l’entreprise, une démarche RPS doit nécessairement être portée par la direction et l’encadrement pour avoir du sens et ainsi ruisseler dans toute l’entreprise. Pour ce faire, on veillera par exemple à communiquer les indicateurs lors des COMEX, puis à les transmettre à l’ensemble des managers et des collaborateurs.
Étape n°2 : Identifier & évaluer les risques
Une fois l’équipe formée, il s’agit maintenant de s’atteler à la tâche en commençant par l’identification des risques, puis leur évaluation. L’ensemble de la démarche de prévention reposant sur cette étape, il est particulièrement crucial qu’elle soit menée avec le plus de rigueur et de minutie possibles.
Quels indicateurs utiliser ?
La première mission est de déterminer quels sont les indicateurs à suivre. Si tous ont leur intérêt, certains peuvent être plus pertinents que d’autres selon l’entreprise, l’activité, et de manière générale, les caractéristiques propres d’une organisation. Il s’agira donc d’établir une hiérarchie.
L’Institut National de Recherche et Sécurité (INRS) distingue trois types d’indicateurs :
Les indicateurs de moyens et de risques tels que : le nombre d’actions de formation en prévention, le nombre d’actions correctives mises en place, l’évolution du nombre de postes figurant dans le DUER, les mesures d’ambiance effectuées, etc.
Les indicateurs du bilan annuel d’hygiène et de sécurité, et du rapport annuel du médecin du travail tels que : le nombre d’accidents du travail ou de maladies professionnelles, le taux de fréquence, le taux de gravité, le nombre d’incidents ou de presque-accidents, la fréquentation de l’infirmerie, etc.
Les indicateurs RH tels que l’absentéisme, le turnover ainsi que d’autres éléments issus du bilan social.
Comment mener l’évaluation des RPS auprès des salariés ?
Tout essentiels qu’ils soient, les indicateurs seuls ne sont pas suffisants pour identifier et surtout évaluer les RPS auprès des salariés. Pour compléter vos données, il faut être à l’écoute des salariés et les interroger. Quatre niveaux d’écoute peuvent alors être envisagées
Niveau 1 : Adjoindre des questions relatives aux RPS à l’enquête sociale annuelle
Niveau 2 : Créer un questionnaire ponctuel dédié
Niveau 3 : Réaliser une analyse sémantique de verbatim ou de commentaires recueillis grâce à des enquêtes ou lors d’entretiens semi-dirigés
Niveau 4 : Mettre en place des groupe d’expression auprès d’échantillons représentatifs
Rédiger le DUER
Une fois les indicateurs déterminés et les informations réunies, débute la rédaction du DUER sur lequel se fondera toute action future en termes de prévention des RPS. Pour ce faire, 4 étapes à suivre :
Préparer l’évaluation des risques À ce stade, cette étape a été réalisée : création de l’équipe, détermination des indicateurs, récolte d’informations auprès des collaborateurs.
Identifier les risques Il s’agit d’analyser toutes les données collectées afin de déterminer les risques professionnels qu’elles indiquent. Pour cela, la classification des risques professionnels en six catégories, évoquée plus haut, peut être un outil utile.
Classer les risques L’ensemble des risques a été identifié, il faut maintenant mener un travail de classification et de hiérarchisation : par fréquence, par gravité, par nouveauté, etc.
Proposer des actions Une fois la liste des RPS établie et ordonnée, un travail de réflexion débute à nouveau pour déterminer quelles actions seraient pertinentes, possibles, efficaces, etc. Si l’équipe réunie pour mener le projet RPS est bien entendu en première ligne pour ce travail, il convient également d’être à l’écoute de l’ensemble des collaborateurs afin de déterminer collectivement ce qui est le plus judicieux et le plus à propos.
Étape n°3 : Agir
Le DUER est maintenant établi. Cela ne suffit cependant pas : la loi enjoint de faire suivre toute démarche d’évaluation par des actions concrètes, en cohérence avec les résultats de l’évaluation.
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