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  • Photo du rédacteurSchmidt Brunet Litzer

Contrôle des salariés : le juste équilibre entre sécurité et protection des libertés.


Il s’avère que près de 15 à 20 % des accidents professionnels, de l'absentéisme et des conflits au travail sont liés à l'usage d'alcool, de médicaments ou de stupéfiants.


En vertu de l’article L. 4121-1 du Code du travail, il revient à l’employeur de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique ainsi que mentale des travailleurs.

Aussi, le contrôle de la consommation de stupéfiant par les salariés relève des droits inhérents au pouvoir de direction de l’employeur sous certaines conditions.


Comment ce contrôle permet-il d’assurer la balance entre l’impératif de sécurité des salariés auquel est tenu l’employeur et la protection des droits et des libertés individuelles des salariés, en particulier le droit au respect de leur vie privée, dont ils bénéficient même au temps et au lieu de travail ?


Sommaire :


1. Le dépistage en entreprise : un contrôle réglementé

2. Les types de tests autorisés dans le cadre d’un dépistage par l’employeur

3. Les conséquences pour le salarié d’un test positif










1. Le dépistage en entreprise : un contrôle réglementé


Selon les dernières estimations, nombreux sont les salariés qui consomment régulièrement ou occasionnellement des produits illicites.

Que se passe t’il si un salarié se présente à son poste avec des signes manifestes de consommation de stupéfiant ?


L'usage, la détention et la vente de stupéfiants étant illicite, l’employeur, au regard de l’obligation de sécurité pesant sur lui, devrait avoir l’obligation de procéder au dépistage de ses salariés.

Et pourtant, l’impératif de sécurité auquel est tenu l’employeur ne lui permet pas un contrôle absolu de ses salariés. La jurisprudence en matière de dépistage rappelle que cette possibilité est strictement encadrée, plusieurs conditions devant être respectées.

Tout d’abord, le règlement intérieur doit prévoir le principe du contrôle et ses modalités. Parmi les modalités, le règlement doit rappeler qu’il réserve ce contrôle aux salariés occupant des postes pour lesquels l'emprise de la drogue constitue un danger particulièrement élevé pour eux-mêmes et pour les tiers. Afin d'éviter toute difficulté sur ce point, il est donc indispensable, comme en matière de dépistage d’alcool, d'annexer au règlement intérieur la liste des postes à risques pouvant faire l'objet d'un dépistage[1].


Ce même règlement doit prévoir la faculté pour le salarié de demander une contre-expertise médicale en cas de résultat positif, à la charge de l'employeur. Par ailleurs, il doit être imposé à l'employeur et au supérieur hiérarchique qui pratique le test de respecter le secret professionnel sur les résultats.

2. Les types de tests autorisés dans le cadre d’un dépistage par l’employeur


Dans le cadre d’un dépistage de stupéfiants, trois types de tests existent : le test sanguin, le test urinaire et le test salivaire. Le test sanguin ne pouvant être pratiqué que par un médecin, il est exclu des droits inhérents au pouvoir de direction de l’employeur. Néanmoins, la question s’est posée de savoir si le test urinaire et le test salivaire pouvaient être, quant à eux, pratiqués par l’employeur.

Après un débat jurisprudentiel, le Conseil d'État a finalement tranché et jugé que le test salivaire n'ayant pas le caractère d'un examen de biologie médicale au sens des articles L. 6211-1 et L. 6211-7 du Code la santé publique, il n'a pas à être réalisé par un biologiste médical ou sous sa responsabilité et aucune autre règle, ni aucun principe ne réserve le recueil d'un échantillon de salive à une profession médicale[1]. Dès lors, un dépistage salivaire peut être effectué par n’importe quelle personne appartenant à l’entreprise et désignée dans le règlement intérieur.


Une Cour d'appel a également autorisé le recours à un test urinaire, prévu dans le règlement intérieur de l'entreprise, en estimant que ne constitue pas un examen biologique un test permettant une détection immédiate et par une lecture instantanée de produits stupéfiants consommés dans un temps récent[2].


Aussi, la rédaction du règlement intérieur doit être particulièrement méticuleuse. C'est une politique d'entreprise exigeante, mais c'est à cette condition que la conciliation entre la sécurité des personnes et la protection des libertés sera assurée.


3. Les conséquences pour le salarié d’un test qui s’est révélé positif


Pour la Haute Juridiction administrative[1], le règlement intérieur autorisant le recours à un test salivaire dans les conditions ci-dessus énoncées peut valablement prévoir que le salarié s’expose, en cas de contrôle positif, à une sanction disciplinaire pouvant aller jusqu'au licenciement.


De son côté, la Cour de cassation a jugé valide le licenciement d’un steward qui avait consommé des stupéfiants, qui se trouvait dans cet état dans l'exercice de ses fonctions et n'avait pas, de ce fait, respecté les obligations prévues par son contrat de travail et avait ainsi fait courir un risque aux passagers[2].


Le licenciement a également été retenu pour un salarié qui sous l'emprise de stupéfiants avait causé un accident de la circulation au volant d'un véhicule de la société qui l'employait[3] ; mais aussi s’agissant du salarié qui avait pris son poste de travail après avoir consommé de la drogue et qui présentait des signes de somnolence, titubait et ne maîtrisait plus ses trajets, ce qui constituait un danger pour lui-même et pour les autres dans la mesure où il devait conduire des transpalettes[1].


A contrario, il a été jugé que le licenciement d'un salarié qui s'est vu retirer son permis de conduire pour conduite sous l'emprise d'une drogue en dehors du temps de travail est sans cause réelle et sérieuse si la conduite d'un véhicule ne constitue pas l'un des éléments de sa fonction[2].


Les conditions fixées par le règlement intérieur doivent être strictement respectées par l’employeur : en cas de non-respect des conditions prévues au règlement intérieur, l'éventuelle sanction prononcée à l’égard du salarié sera annulée.


[1] Selon la Mission interministérielle de lutte contre la drogue et les conduites addictives (Mildeca)

[2] Cass. soc., 24 févr. 2004 no 01-47.000, JSL no 145, 11 mai 2004 ; Cass. soc., 31 mars 2015, no 13-25.436, JSL no 388, 29 mai 2015.

[3] CE, 5 déc. 2016, no 394178, JSL no 425, 10 févr. 2017

[4] CA Amiens, 27 janv. 2021, no 19/04143

[5] CE, 5 déc. 2016, no 394178

[6] Cass. soc., 27 mars 2012, no 10-19.915, JSL no 323, 7 juin 2012

[7] CA Douai, 26 oct. 2012, no 11/04347


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