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Harcèlement moral au travail : Les sanctions encourues sont-elles à la hauteur ?


harcèlement morale, les sanctions encourues

Deux mois après le jugement historique condamnant France Telecom et ses anciens dirigeants, un colloque organisé le 27 février à Paris par le syndicat CFE-CGC en partenariat avec Technologia relance le débat sur la nécessité de réformer le délit de harcèlement moral au travail.


Le 20 décembre 2019, dix ans après une vague de suicides de salariés de l’entreprise, France Télécom et ses anciens dirigeants ont été reconnus coupables de « harcèlement moral institutionnel » (et de complicité de harcèlement) par le tribunal correctionnel de Paris. Pour les 8 prévenus, ce sont les peines maximales prévues par l'article 222-33-2 du code pénal tel qu'en vigueur au moment des faits qui ont été prononcées : 75 000 euros d’amende pour l’entreprise, un an de prison (dont 8 mois avec sursis) et 15 000 euros d’amende pour l’ex-PDG, l’ex-numéro 2 et l’ex-DRH, et 4 mois de prison (avec sursis) et 5 000 euros d’amende pour les quatre autres prévenus. Tous – à part l’entreprise Orange – ont fait appel.

La décision, historique, fait entrer la notion de harcèlement moral institutionnel (ou managérial) dans la jurisprudence. Nombreux sont ceux qui se sont émus de la faiblesse des peines prononcées. Aujourd’hui, elles seraient plus importantes, le législateur ayant en 2012 doublé la peine encourue – c’est désormais jusqu’à 2 ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende.

« Au regard des drames suicidaires, des dépressions et de la souffrance des victimes, les sanctions prononcées sont faibles. Il est indispensable de disposer de peines alternatives pour prévenir la récidive », plaide Jean-Claude Delgènes, président fondateur du cabinet d’expertise Technologia, qui est intervenu plusieurs fois au sein de France Télécom. L’amende infligée à l’entreprise apparait notamment dérisoire au regard de son chiffre d’affaires.

Ajouter des circonstances aggravantes


À l’initiative d’un collectif regroupant chercheurs, professionnels de la santé au travail, inspecteurs du travail, avocats et magistrats, une pétition demandant au législateur de renforcer les sanctions encourues a été lancée en février. « Force est de constater que les sanctions prévues en la matière par le code pénal restent inadaptées », soulignent les signataires. Le colloque organisé le 28 février par l’UD75 de la CFE-CGC avait pour objectif de mobiliser plus largement les acteurs de la santé au travail et les représentants des salariés autour de cette initiative.

Les auteurs de la pétition estiment notamment nécessaire de compléter la législation afin de prévoir des circonstances aggravantes, réunion, préméditation, voire bande organisée, des concepts du droit pénal qui ne sont pas aujourd’hui retenus en cas de harcèlement moral au travail. Ils proposent aussi de prononcer des interdictions de diriger des équipes pour les managers harceleurs ou encore des restrictions pour l’accès aux marchés publics des entreprises les plus défaillantes.

« La question de la complicité se pose pour les cabinets conseils qui participent à la mise en œuvre de certaines politiques managériales dans les grandes entreprises », ajoute Yves Monerris, avocat pénaliste.



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Rôle préventif de la justice


Le collectif préconise de renforcer le rôle préventif de la justice pénale en permettant au procureur de la République de conclure une convention judiciaire d’intérêt public avec une personne morale mise en cause pour des faits de harcèlement. Cette procédure, une alternative aux poursuites judiciaires, est déjà prévue pour des faits de corruption ou de fraude fiscale. Elle permet d’éteindre l’action publique si la personne morale mise en cause exécute les obligations auxquelles elle s’est engagée dans la convention.

« Une telle mesure ne permettrait-elle pas à une entreprise d’acheter son innocence ? Cela pose question », a cependant pointé la sénatrice Génération.s Sophie Taillé-Polian qui s’était déplacée pour l’évènement et qui, depuis le jugement, s'est saisie de la question, avec la volonté de préparer une évolution législative.

La question de la réparation


Si les salariés sont théoriquement protégés lorsqu’ils dénoncent des faits de harcèlement moral, ces allégations entraînent quasi systématiquement un licenciement. « Je n’ai jamais vu quelqu’un qui reste en poste après avoir dénoncé un harcèlement. La rupture du contrat de travail intervient tôt ou tard », signale Karima Said, avocate en droit du travail. Les conseillers prud’hommaux ne reconnaissent que très rarement le harcèlement. Les victimes n’ont d’autre solution que de passer devant les cours d’appel, des procédures judiciaires longues, et coûteuses pour les victimes.


« Le harcèlement moral est susceptible d’altérer gravement la santé psychique de ceux qui en souffrent. Et la souffrance de ces salariés ne peut toujours pas être reconnue en maladie professionnelle », a déploré Michel Debout, professeur de médecine et psychiatre. Pour ce psychiatre, auteur de plusieurs travaux sur le suicide ou le harcèlement moral au travail, la reconnaissance en maladie professionnelle des effets du harcèlement permettrait non seulement la réparation mais aussi la prévention. Michel Debout est l’un des auteurs du rapport attendu de l’Observatoire national du suicide, consacré aux liens entre les suicides, le travail et le chômage.


Ce rapport devait être initialement rendu public début février, mais sa diffusion a été in extremis annulée par le gouvernement.




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